Contrôle social, on perds notre sang froid !

Une année déjà que le gouvernement annonce la création d’une nouvelle Start-Up Nation : France Travail. Après France Stratégie (qui anime le débat public zic), France Compétences (pour la liberté de choisir son avenir professionnel zic), France Services (les services publics près de chez vous mais dématérialisés), vient tout naturellement la création de France Travail. On attend désormais France Famille pour la natalité et le travail domestique !
Le Conseil Constitutionnel a validé le 14 décembre dernier le projet de loi pour le plein emploi. Pôle Emploi deviendra France Travail et l’État va capter les fonds de l’Unedic en excédent (les cotisations des salarié·es) pour financer ce
gros réseau de gouvernance.

Aucun décret d’application n’a encore été publié depuis la promulgation de la loi le 14 décembre 2023 et 10 décrets doivent être pris dont celui qui concerne le fonctionnement du réseau - Comité National pour l’Emploi début 2024.

En effet France Travail centralisera toutes les données nécessaires des différents organismes qui lui sont rattachés comme les opérateurs (Pôle Emploi, les Missions Locales…), les partenaires sociaux, les collectivités, les maisons de l’emploi…etc et surtout la Caf (la plus grande base de données) ! Une énorme CENTRALISATION de ces données sensibles qui pose un problème de taille outre son coût ! Où seront-elle hébergées ? Dans le data center de Pôle-Emploi (puisque Pôle Emploi va finalement être rebaptisé France Travail) ou bien dans le privé ? La Caf doit d’ailleurs changer son système informatique (vieillissant comme celui de Pôle Emploi) sans que ces conseillers techniques n’en soient informés !
Lors d’une journée d’études sur France Travail sur Nantes, réunissant une quarantaine de camarades syndiqué·es CGT concerné·es, on a appris que 300 équivalents temps-plein seront créés à Pôle Emploi uniquement sur l’élargissement de l’expérimentation RSA. Pour rappel, cette expérimentation (votée dans le projet de loi pour le plein emploi) : c’est l’obligation pour les bénéficiaires du RSA (et certain.es artistes-auteur.ices sont concerné.es) d’effectuer un minimum de 15 heures d’activités hebdomadaires, en entreprise ou en formation et surtout d’être inscrits à Pôle Emploi ! On ne sait pas encore ce que ce sera la nature de ces activités ?

Est-ce que le travail de création est une activité aux yeux de France Travail ? Est-ce que la formation syndicale peut entrer dans ces activités ? On a le droit de rêver !

Mais l’enjeu de ce projet (adopté par 190 voix contre 147, le 14 novembre) est tout autre…
« Le rapport de préfiguration ne mentionne plus les “partenaires sociaux” et affirme que France Travail va permettre “l’affirmation de la place de l’État (préfet, DREETS-DDETS, rectorat) et des collectivités pour assumer la gouvernance politique, stratégique et financière du réseau”. À première vue, il n’y a rien de choquant à cela. Mais il faut se rappeler que c’est parce que les syndicats ont été progressivement écartés de la gestion de l’Assurance-chômage que toutes les réformes régressives de ces dernières années ont été rendues possibles. »*

La véritable mesure du projet de loi pour le plein emploi est l’intensification sans précédent du contrôle des classes populaires (allocataires du RSA, chômeur.euses, lycéen·nes pro..etc) rendue possible par la création de “France Travail” et la centralisation des données qu’elle permet. C’est un contrôle social institutionnalisé sous le contrôle des préfets et donc du Ministère de l’intérieur !

En 2025, toute la France sera organisée en France Travail et ce sera une énorme réforme pour Pôle emploi.

L’enjeu de France Travail, c’est bien de réunir sous la contrainte une main d’œuvre à bas-coût (les classes populaires) pour le patronat (dans des métiers en tension qui ne demande pas de qualification) ! En cela la Macronie (de “pantouflards” HEC) répond aux exigences du privé et ira jusqu’au bout pour atteindre ses objectifs, à savoir passer à -5% de chômage pour 2027. Comment ? Il suffit juste de biaiser les modes de calcul et donc les chiffres et parallèlement réformer (au 49.3) la réduction (par exemple) de la durée d’indemnisation lorsque le chômage (au National) est à - de 9%. La « vision charitable de l’aide sociale imprègne ce projet de loi : pour recevoir de l’aide, nous devons la mériter. C’est pourquoi le projet de loi “France Travail” comporte un “accompagnement” totalement infantilisant et déresponsabilisant où des organismes vont s’occuper de vous, jusqu’à vous faire travailler gratuitement. »

Le PLEIN EMPLOI est une licorne, mais on va vous le faire ̶c̶r̶o̶i̶r̶e̶ avaler sous la contrainte et sous sanctions, pauvres indigent·es.
« Face à cette attaque monstrueuse, entièrement inspirée de la rhétorique d’extrême-droite sur “l’assistanat”, il va falloir que nous restions fermes sur nos bases : oui, dans un pays riche comme le nôtre, la solidarité est entièrement possible et nous pourrions garantir à quiconque de vivre avec un revenu décent, sans craindre l’avenir. »
Nous sommes fort·es de propositions, fort·es dans nos solidarités et il va falloir AFFIRMER syndicalement et collectivement nos valeurs qui ne sont pas brunes mais multicolores !

Comme le disait Emma Goldman « tout ce qui est bon et beau dans l’être humain se manifeste en dépit du gouvernement et non grâce à lui. »*


article écrit par la camarade Mary-loup que vous pouvez retrouver en slide sur l'instagram du SNAPcgt.


Ressources • Le rapport de Thibaut Guilluy (Haut-commissaire à l’emploi et l’engagement des entreprises) « FRANCE TRAVAIL, UNE TRANSFORMATION PROFONDE DE NOTRE ACTION COLLECTIVE POUR ATTEINDRE LE PLEIN EMPLOI ET PERMETTRE AINSI L’ACCÈS DE TOUS À L’AUTONOMIE ET LA DIGNITÉ PAR LE TRAVAIL » (avec la Macronie, il est adapté de traduire ce tire avec des antonymes)

  • décryptage de Nicolas Framont sur Frustration
  • citation « La liberté ou rien : Contre l'État, le capitalisme et le patriarcat » de Emma Goldman